Soudan: à Khartoum, les civils pris entre les feux croisés de l’armée et des paramilitaires

Soudan: à Khartoum, les civils pris entre les feux croisés de l’armée et des paramilitaires

17 avril 2023 Non Par LA RÉDACTION
De la fumée s'élève au-dessus de bâtiments d'habitation dans l'est de Khartoum, le 16 avril 2023.

Les combats se poursuivent entre les forces armées soudanaises dirigées par Abdel Fattah al-Burhan et les paramilitaires des forces de soutien rapide. Le face à face est toujours incertain alors que les deux armées sont lancées dans une guerre de propagande. À Khartoum, le conflit a tourné à la guérilla urbaine. Malgré les appels à la désescalade qui se multiplient à l’étranger, les deux camps poursuivent leur guerre fratricide qui a fait 97 morts selon un bilan dressé ce lundi matin par le syndicat des médecins. Sans eau ni électricité dans certains quartiers, les civils vivent sous les feux croisés.

Les échanges de tirs sont continus dans la ville malgré l’annonce d’une trêve humanitaire de 3 heures censée permettre aux civils d’évacuer les zones de combat. Au milieu du chaos, certains habitants se sont aventurés dans la rue pour aller faire le plein de provisions dans les rares échoppes encore ouvertes.

À l’intérieur les gens se bousculent, certains comme Kamal n’avaient plus de nourriture depuis deux jours. « C’est au-delà de tout ce que je pouvais imaginer. Je suis sous le choc. Si les deux parties ne négocient pas, le pays va se fragmenter. Malheureusement on s’y attendait… »

Malgré les risques de balle perdue, des hommes ont étendu un tapis à même le sol pour partager l’iftar, la rupture du jeûne en ce mois sacré du ramadan. « C’est une guerre entre deux armées, mais ce sont les citoyens qui versent leur sang. On ne sait pas qui va gagner, les deux forces sont puissantes, mais les civils se retrouvent pris entre deux feux. Ce sont des jours difficiles, on ne sait pas de quoi demain sera fait ».

Les habitants du quartier se hâtent de rentrer chez eux, la nuit tombe et les combats redoublent d’intensité.

Nous demandons aux civils de rester chez eux. À l’hôpital, nous avons des morts et nous avons aussi beaucoup de blessés, touchés par des balles dans différentes parties du corps : à la poitrine, l’abdomen, aux membres et à la tête. Et je peux vous dire qu’il y a encore plus de décès qu’on ne le pense, il y en a plus, car des personnes blessées n’arrivent pas à rejoindre l’hôpital. Ici, nous n’avons que des civils. Des civils de différents quartiers de la ville, il n’y a aucun militaire parmi eux.

Le témoignage d’un médecin de Khartoum

Situation confuse

Pour l’heure, il est toujours difficile aujourd’hui de cerner le rapport de forces. Chaque camp revendique des succès militaires. Les FSR prétendent détenir l’aéroport et le Palais présidentiel, ce que dément l’armée qui assure quant à elle conserver son QG. Les deux clament avoir pris la télévision nationale, qui continue d’émettre des chants patriotiques à longueur de journée.

Les tirs et les bombardements se sont poursuivis ce dimanche dans les rues de Khartoum. Bien que les deux parties aient accepté d’ouvrir des couloirs humanitaires durant trois heures l’après-midi, les combats n’ont pas ralenti, au grand regret des médecins qui comptabilisaient dimanche déjà plus de 600 blessés.

Le Programme alimentaire mondial a quant à lui suspendu son aide humanitaire, après la mort de trois de ses employés. Et Antonio Guterres, secrétaire général de l’ONU a réclamé que les responsables soient « traduits en justice au plus tôt. » La Ligue arabe et l’Union africaine se sont chacune réunie en urgence dimanche. Moussa Faki Mahamat, président de la commission de l’UA, se rendra au plus vite au Soudan pour « engager les parties vers un cessez-le-feu. »

 

RFI