Le procès du massacre du 28 septembre qui se déroule depuis quelques semaines à Conakry, a pris une tournure nouvelle avec la très attendue prise de parole du capitaine Moussa Dadis Camara. Ce dernier aurait dû parler il y a déjà une semaine, si des ennuis de santé ne l’en avaient empêché. Mais c’est désormais chose faite. Le capitaine Dadis Camara, chef de la junte militaire au pouvoir au moment des faits, doit désormais dire ce qu’il sait ou ce qu’il retient encore, douze longues années après ces massacres qui endeuillèrent de nombreuses familles en Guinée et horrifièrent la conscience de tout un continent, voire du monde entier.
Des centaines de morts, de blessés et de violées
Ce 28 septembre 2009, une répression hors du commun, barbare et féroce l’ont qualifiée les défenseurs des droits de l’homme, a fait au moins 157 morts, des centaines de blessés et plus de cent femmes violées. Le seul tort des victimes a été de s’être réunies dans le stade mythique de Conakry et aux alentours dans le but de dissuader le chef de la junte de se présenter à la présidentielle prévue, à l’époque, pour janvier 2010. Canons en l’air et braguettes béantes, les hommes de tenue ont commis les pires atrocités qui soient, tuant, blessant et violant sans autre forme de procès!
Le «Dadis show» nouveau n’a aucun avenir
Et voilà que Moussa Dadis Camara président de la Guinée, au moment des faits, attendu pour répondre des horreurs d’hommes qui n’ont fait que sa volonté, nie en bloc toute responsabilité, se lançant dans ces discours vides de tout sens, dont il a seul le secret. Mais visiblement, le «Dadis show» a fait son temps de divertissement et d’humiliation d’hommes d’affaires et de politiques et n’a plus aucune chance de prospérer! De toute évidence, le capitaine qui voulait se faire passer pour Thomas Sankara, le héros de la révolution burkinabè, lorsqu’il a confisqué le pouvoir par les armes et a tenté en vain de se faire une virginité par les urnes, s’est senti pris dans un piège dont il lui sera difficile, voire impossible de se dépêtrer. Il a beau, dans une sorte de transe, accuser les anciens présidents Alpha Condé et le général Sékouba Konaté d’avoir fomenté un complot contre sa personne, ses arguties porteront difficilement fruit.
Bien vite, Dadis a perdu la sérénité qui était sienne au moment où il rentrait de son si long exil «ouagalais». Il a visiblement été lâché par les siens et sa cause semble déjà entendue.
Une pierre trois coups pour le colonel Mamadi Doumbouya
Le capitaine ne sera ni plus, ni moins que le mouton de sacrifice qui permettra au pouvoir de la transition de faire d’une pierre trois coups: faire diversion autour de la transition dont le contenu et la durée sont mal cernés; faire croire à l’opinion que les droits humains sont une priorité dans une Guinée où, pourtant les dirigeants de la société civile sont embastillés et les responsables politiques contraints à l’exil; et enfin donner l’illusion aux victimes et familles des victimes que leur soif de justice sera étanchée grâce au pouvoir par intérim.
«Sic transit gloria mundi»
«Sic transit gloria mundi», disaient les latins pour dire qu’ainsi passe -vaine- la gloriole des hommes! Et ce sera la véritable leçon de ce procès du 28 Septembre! Voir aujourd’hui le «puissant» Dadis de l’époque se débattre et s’agiter comme face à un ennemi invisible, se perdre dans son raisonnement ou plutôt dans son «déraisonnement» et par moment, sortir du contexte spatio-temporel du procès, cela doit donner à réfléchir aux «intouchables» de l’heure. La valeur cathartique de la scène? Une véritable leçon de chose, est-on tenté de dire! Et c’est déjà cela de gagné!
Sus aux anciens dirigeants!
C’est dans la même veine que se présentent ces lourdes sanctions du Département du Trésor américain contre des régimes ou dirigeants politiques soupçonnés de corruption. Sur cette liste figure un autre Guinéen, l’ancien président Alpha Condé, chassé du pouvoir en septembre 2021 par le putsch militaire du colonel Mamadi Doumbouya. Le gouvernement américain l’accuse de la répression dans le sang de ses opposants qui protestaient contre son troisième mandat.
Comme quoi, nul ne peut être aussi fort pour demeurer éternellement fort! A méditer par nos puissants du jour!
Par Wakat Séra