Mali : à son tour, la Banque mondiale coupe le robinet à Bamako

Mali : à son tour, la Banque mondiale coupe le robinet à Bamako

5 novembre 2023 Non Par LA RÉDACTION

Estimant le Mali trop en retard quant à ses échéances de paiement de sa dette publique, la Banque mondiale a décidé de suspendre ses décaissements dans le pays. Un nouveau coup dur porté à l’économie malienne.

Alousséni Sanou, le ministre malien de l’Économie et des Finances, à Bamako, le 25 mars 2021. © Ministère de l’Économie et des Finances du Mali/Facebook 

C’est une décision qui n’arrange pas les affaires du ministre malien de l’Économie et des Finances. Dans un courrier, daté du 14 avril et adressé aux coordinateurs des projets et programmes financés par la Banque mondiale, Alousseni Sanou informe ces derniers que l’institution de Bretton Woods a décidé de suspendre ses décaissements en raison de l’accumulation des échéances au titre du service de la dette publique pendant plus de 45 jours.

« La présente lettre – dont l’envoi a été confirmé à JA par le ministère de l’Économie –, a pour objet de vous informer de cette décision de suspension des décaissements de la Banque mondiale et vous inviter à prendre les dispositions nécessaires pour informer les entreprises et autres prestataires, titulaires de marchés dans le cadre de la mise en œuvre de vos projets et programmes, de ladite décision et de me fournir au plus tard le 20 avril l’impact de ladite suspension sur la mise en œuvre de vos activités (…) », informe le ministre.

À 

Les défauts de paiement atteignent 180 millions de dollars

L’arrêt des financements de la Banque mondiale est une conséquence indirecte des sanctions infligées à Bamako par les chefs d’État ouest-africains. Le pays n’a, du reste, toujours pas accès à ses avoirs financiers gelés, bien qu’une décision de la Cour de justice de l’Uemoa a été rendue en faveur d’une levée de cette sanction.

« Cette décision va porter un coup dur à l’économie malienne et aux engagements internationaux liés à la situation des programmes de la Banque mondiale », insiste sous couvert de l’anonymat un haut financier malien. Au cours des trois dernières années, les engagements de l’institution financière ont chuté de 296 millions de dollars en 2020 à 82 millions cette année.

LA DÉCISION DE L’INSTITUTION FINANCIÈRE PEUT CRÉER UN EFFET BOULE DE NEIGE »

À fin mars, Bamako n’avait pas payé pour 46,32 milliards de francs CFA (78,5 millions de dollars) en principal et intérêts, sur une obligation du Trésor, d’après la dernière note de l’agence Umoa-Titres. Ce qui porte à 180 millions de dollars le total des défauts de paiement de la dette dus aux sanctions consécutives aux deux coups d’État.


>>> Lire aussi notre dossier : Le Mali face aux sanctions de la Cedeao <<<


Bientôt le FMI, la BAD… ?

« La décision de la Banque mondiale renvoie le Mali et les institutions régionales dos à dos en s’appuyant sur les mesures économiques et financières à l’encontre du Mali pour suspendre ses décaissements », décrypte un banquier ouest-africain, contacté par JA.

Selon lui, cette décision de l’institution financière peut créer un effet « boule de neige » auprès des autres bailleurs (FMI, Banque africaine de développement, etc.) et des partenaires bilatéraux, notamment les investisseurs dans les secteurs minier et agricole.

La Banque mondiale étant un partenaire de référence, les rapports et la lettre d’intention du Fonds pour bâtir leurs interventions dans les pays en développement sont scrutées avec attention.

Répercussions sur le système bancaire

Malgré les effets combinés de la crise sanitaire et des contreperformances agricoles, le PIB réel malien a légèrement progressé en 2021, avec une croissance estimée à 3,1 %, tirée par la reprise dans les secteurs agricoles et des services.

Une résilience qui permet aujourd’hui à l’État malien d’honorer – malgré l’embargo – le paiement des salaires des agents publics et de faire face aux dépenses de fonctionnement. Alors qu’une incertitude plane sur le maintien des aides budgétaires apportées par l’Union européenne et le FMI, plusieurs analystes redoutent des répercussions fâcheuses sur le système bancaire du pays.

jeuneafrique