Guinée: le Fouta-Djalon, «le château d’eau de l’Afrique de l’Ouest» en péril
10 juin 2024 Non Par LA RÉDACTION
Le Fouta-Djalon, massif montagneux, se trouve principalement en Guinée. Il se caractérise par l’ampleur et la diversité de son réseau hydrographique qui s’étend à neuf autres pays de l’Afrique de l’Ouest: le Bénin, la Gambie, la Guinée-Bissau, le Mali, la Mauritanie, le Niger, le Nigeria, le Sénégal et la Sierra Leone. «L’intérêt pour l’Afrique de l’Ouest de préserver le massif du Fouta-Djalon (MFD), se comprend aisément. Il est considéré comme le château d’eau de l’Afrique de l’Ouest », a fait remarquer Dr Robert Gouantoueu Guei.
Un résevoir pour l’Afrique de l’Ouest
En effet, 1 165 cours d’eau prennent leur source dans le MFD et la Dorsale Guinéenne. Le massif abrite les têtes de source et les bassins supérieurs de 7 fleuves partagés par la quasi-totalité des pays de l’Afrique de l’Ouest, notamment la Gambie, le Niger et le Sénégal et un certain nombre de petits cours d’eau. Il est également l’une des principales sources de réalimentation des eaux souterraines de la sous-région, essentielles pour répondre aux besoins domestiques et agricoles des populations.
Le massif du Fouta-Djalon constitue un immense réservoir de diversités biologiques à protéger et à préserver, car il abrite de nombreuses espèces végétales et animales, dont certaines sont considérées endémiques.
Toutefois, il subit depuis quelques années une dégradation accélérée de ses ressources naturelles, en raison des changements climatiques et des interventions humaines. La visite de terrain conjointe en Guinée du 26 mai au 2 juin dernier, «nous a permis de mieux nous imprégner des menaces encourues, et de souligner l’urgence des mesures à prendre pour sauvegarder ce massif montagneux», a confié Dr Gouantoueu Guei, aux médias du Vatican. L’objectif de cette mission a été de renforcer le plaidoyer sur l’importance d’un appui amélioré et adapté à la gestion des ressources naturelles et de l’eau dans le massif.
De réelles menaces
Au cours des décennies écoulées, les activités humaines et effets du changement climatique, ont mis en danger les ressources naturelles du massif, et ont contribué à en diminuer la valeur comme source d’eau, de biodiversité endémique et de potentiel bio-productif de l’environnement national et sous-régional.
Parmi les indicateurs de la dégradation environnementale, figurent entre autres: la réduction du couvert végétal; l’accélération de l’érosion du sol. Mais aussi, la modification des caractéristiques du sol et la baisse de fertilité. Outre la réduction des espèces de flore, de la faune et des poissons, l’on assiste à une augmentation du ruissellement et au tarissement des sources. «La dégradation du massif est très visible. La situation est inquiétante, et les conséquences risquent d’être très désastreuses», a averti le directeur de la FAO pour l’Afrique de l’Ouest.
Les Conséquences
«S’il n y a pas d’actions fortes pour arrêter cette ‘’agression’’ du massif d’ici une dizaine d’années, ces cours d’eau pourraient s’assécher, et ça serait vraiment catastrophique, d’autant plus que le massif couvre plus de 10 pays de la sous-région». Aussi, «une telle situation entrainera le déplacement des populations de ces zones touchées. Ces déplacements internes pourraient même susciter des conflits intercommunautaires», a-t-il alerté.
Entre autres conséquences pour les populations: la famine. Du fait que l’agriculture utilise 70% de l’eau, pareil pour l’industrie, l’énergie et la santé. «Nous risquons d’assister à une situation catastrophique», a-t-il ajouté, exhortant à des actions concertées de tous
Une proposition d’actions à mener
«Nous avons besoin d’une grande mobilisation d’ensemble de la FAO, du PAM, de la CEDEAO, des Nations unies et des pays concernés pour sauver le massif», a affirmé Gouantoueu Guei.
«Consciente de la situation, la Guinée est très engagée dans la sauvegarde du massif» a-t-il laissé entendre, appelant ensuite les autres pays concernés à ne pas rester en marge de la lutte pour la survie du massif.
Ces actions à mener constitueront trois axes majeurs: le premier concerne la Communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest.
Sous l’égide de l’organisation sous-régionale, une réunion portant sur un vaste programme de gestion intégrée du massif sera organisée fin juin 2024 à Lomé au Togo.
Les recommandations au sortir de cette réunion seront transmises aux ministres de l’environnement, des eaux et forêts des pays concernés.
Une autre réunion suivra au niveau du Conseil des ministres de la CEDEAO, pour statuer sur ces différentes recommandations avant de les transmettre à la Conférence des chefs d’États qui se réunira en décembre 2024.
Le deuxième axe concernera l’action de la Coordination spéciale de la stratégie intégrée des Nations unies pour le développement au Sahel, en vue de porter la situation du massif du Fouta-Djalon à une plus grande connaissance des Nations unies. Cette initiative devra permettre une action conjointe de l’ONU et de la CEDEAO, dans la recherche des solutions pour la sauvegarde du «château d’eau» de l’Afrique de l’ouest.
Enfin, le troisième axe sera celui des actions techniques et financières que porteront la FAO et le PAM, en vue de mobiliser les autres agences onusiennes et autres grands bailleurs de fonds pour le développement de programmes et de leurs financements.
Dans l’immédiat la FAO, la CEDEAO et le gouvernement guinéen, procèdent à l’identification des besoins des différentes populations vivant dans la zone du massif, et dont les situations nécessitent de l’aide et une assistance. Des actions qui engageront de gros financements, d’où la nécessité pour le directeur de la Fao pour l’Afrique de l’ouest, de réitérer son appel à l’engagement de tous les États de l’Afrique de l’Ouest à une action d’ensemble «pour maintenir en vie le massif du Fouta-Djalon. C’est le temps de l’action», a-t-il conclu.
Vaticannews