L’aube se lève à peine à cinq kilomètres à l’ouest de la ligne de front. Le soldat ukrainien que nous rencontrons se fait appeler le commandant « Lion ». Il fait partie du premier bataillon mécanisé ukrainien, « Les loups de Da Vinci ». Il a encore très peu dormi. « Juste un peu, entre deux heures et quatre heures du matin. »
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L’adrénaline redescend. Le soldat a les mains qui tremblent. Il allume une cigarette et il raconte sa nuit dans les faubourgs de Bakhmout. « J’y étais il y a encore une heure. Les conditions étaient difficiles. Il a plu toute la nuit. Il y avait de la boue partout. La ligne de front bouge régulièrement. On se retrouve sur des positions qui ne sont pas bien préparées », raconte cet homme au visage buriné, visiblement épuisé.
« Les bombes et les obus explosent en permanence. Et quand ça s’arrête, l’infanterie russe passe à l’attaque. »
Le commandant « Lion » du premier bataillon mécaniséà franceinfo
« Pendant les salves d’obus, nos gars sont dans les tranchées et prient, décrit-il. Quand on repère une attaque, on leur tire dessus le plus précisément possible. Pas n’importe comment parce que nous sommes limités en munitions. Je ne sais pas à quoi ressemble l’enfer, mais c’est très difficile et on tient le coup ».
« Les morts sont nombreux »
« Lion » admet ne pas pouvoir « communiquer sur le nombre de morts, mais ils sont nombreux ». Beaucoup sont très jeunes, comme l’était celui qui dirigeait le bataillon des « Loups de Da Vinci », Dmytro Kotsiubailo, un volontaire de 27 ans, alias « Da Vinci » en personne. Vendredi dernier, des milliers d’Ukrainiens lui ont rendu hommage place Maïdan, à Kiev.
Le commandant « Lion » combattait à ses côtés. Trois jours avant, il l’a vu mourir sur une route pilonnée par l’artillerie russe. « Il est tombé en emmenant une des unités sur des positions, raconte-il. Il y avait des bombes à sous-munitions avec un système d’explosion à retardement ».
« Il a reçu un éclat sur le coup et l’artère a été coupée. »
Le commandant « Lion »à franceinfo
« La route entre la tranchée la plus proche de la ligne de front et le premier abri à peu près sûr est très longue, explique le combattant. Et elle est en permanence sous le feu de l’artillerie de l’ennemi. » Mais la bataille de Bakhmouth n’est pas terminée. L’État-major a ordonné à ses troupes de résister. Alors le commandant Lion, en bon soldat, met fin à l’entretien. Et puis, comme tous les jours, il repart au front.
AFP