Le pont de Crimée avait déjà essuyé une violente explosion, en octobre dernier, avant de connaître des réparations. Il a de nouveau été la cible d’une attaque, lundi 17 juillet, qui a conduit les autorités à couper la circulation automobile sur cet ouvrage essentiel pour la Russie.
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Cette infrastructure est en effet la seule à relier le pays à la péninsule annexée de Crimée. La justice russe a ouvert une enquête pénale pour « acte terroriste » et Moscou accuse Kiev d’être à l’origine de ces destructions, à l’aide de drones de surface.
Que s’est-il passé ?
Au moins deux explosions ont retenti vers 3 heures du matin, selon des habitants des alentours cités par les médias russes, en cette période estivale marquée par les transferts de nombreux touristes. D’après Moscou, deux drones de surface ont mené une attaque contre l’infrastructure, endommageant l’un des tronçons.
Un couple circulant à voiture a été tué durant cette attaque, précise le comité d’enquête russe sur Telegram, ajoutant que leur fille de 14 ans a été blessée et hospitalisée. Celle-ci était consciente, et souffrait notamment d’une blessure à la poitrine et au crâne, selon une responsable de l’administration régionale de Krasnodar.
Les dégâts restent encore à évaluer, mais le ministère des Transports a d’ores et déjà annoncé que la chaussée avait été endommagée, ce qui est également visible sur plusieurs images postées dans la matinée, notamment par le comité d’enquête russe. On distingue toutefois que l’une des travées s’est considérablement affaissée. Les enquêteurs sont déjà sur les lieux, dans le cadre d’une enquête pénale ouverte pour « acte terroriste ».
Qui est à l’origine de l’attaque ?
« L’attaque d’aujourd’hui sur le pont de Crimée a été perpétrée par le régime de Kiev », a dénoncé Maria Zakharova, porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, sur Telegram. Celle-ci évoque également la « participation des services de renseignement américain et britannique ».
« L’attaque d’aujourd’hui contre le pont de Crimée est une opération spéciale du SBU et de la marine », a déclaré à l’AFP une source au sein des services ukrainiens de sécurité (SBU). « Le pont a été attaqué à l’aide de drones navals. »
Contacté par le média Suspilne, le porte-parole du renseignement militaire ukrainien, Andriï Yousov, a estimé que cette attaque aurait des conséquences logistiques pour les forces russes, car la Crimée est « une plaque tournante importante » pour le mouvement de leurs troupes et les frappes lancées sur le pays.
Quelles seront les conséquences ?
Le dirigeant d’occupation de la péninsule annexée, Sergueï Aksionov, a demandé aux populations de ne plus emprunter le pont, alors que des embouteillages se sont déjà formés à son approche. Le ministère des Transports recommande désormais d’utiliser un itinéraire alternatif, passant notamment par Marioupol, Berdiansk et Mélitopol, dans les régions occupées de l’Ukraine continentale.
Le pont de Crimée, long de 18 km, consiste en deux ouvrages parallèles, l’un réservé à la circulation routière et l’autre au trafic ferroviaire. La voie ferrée semble intacte et le trafic a pu reprendre après avoir été temporairement interrompu, selon le ministère. L’exploitation des ferries, reliant la région russe de Krasnodar à la péninsule, a également été interrompue avant de reprendre.
Oleg Kriouchkov, conseiller de la péninsule annexée, a par ailleurs annoncé l’ouverture imminente de centres d’hébergement temporaires pour les touristes. Il leur sera proposé de l’aide pour trouver d’autres itinéraires de voyage. Depuis l’explosion du pont en octobre dernier, les véhicules sont dorénavant inspectés à leur entrée sur le pont, ce qui entraînait déjà de fréquents bouchons routiers.
Pourquoi ce pont est-il stratégique ?
Le viaduc, qui enjambe le détroit de Kertch, avait déjà été endommagé le 8 octobre dernier par une puissante explosion, alors attribuée par les autorités russes à un camion piégé par les services secrets ukrainiens. Le pont en béton avait été ensuite remis en service. L’ouvrage avait été inauguré par Vladimir Poutine en 2018, après un chantier évalué à trois milliards de dollars.
Devenu le symbole de l’annexion de la Crimée, l’ouvrage est essentiel pour organiser les mouvements de troupes entre la Russie, la péninsule et le sud de l’Ukraine annexé. « Toute structure illégale utilisée pour livrer des instruments russes de meurtre de masse est nécessairement éphémère… Quelles que soient les raisons de la destruction », a commenté un conseiller de la présidence ukrainienne, Mykhaïlo Podoliak, sur Twitter.
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