Ghana : comment l’exploitation minière illégale fait perdre des millions de dollars au secteur du cacao
13 mars 2023– Premier producteur d’or d’Afrique depuis quelques années, le Ghana tire des milliards de dollars de recettes de son secteur minier en pleine croissance. Selon les estimations officielles, la contribution du secteur à l’économie nationale serait encore plus grande sans les centaines de millions de dollars que fait perdre chaque année au pays l’exploitation minière illégale, connue localement sous le nom de Galamsey. Si le gouvernement met en œuvre des actions pour endiguer le phénomène, sa stratégie tarde encore à se montrer efficace. En attendant, c’est un autre secteur pilier de l’économie, celui du cacao, qui doit en pâtir.
Au Ghana, la question de l’exploitation minière artisanale illégale est un casse-tête pour le gouvernement. Chaque année, de plus en plus de Ghanéens vivant en dessous du seuil de pauvreté se lancent dans cette activité. Selon les données relayées depuis quelques années par les médias locaux, environ un million de Ghanéen se livrent à cette pratique qui ferait vivre environ 4,5 millions de personnes mais causerait des pertes de plusieurs milliards à l’Etat.
« L’utilisation non durable et illégale des terres pour l’exploitation minière. »
Pour cause, le phénomène crée un certain nombre de défis à savoir l’utilisation non durable et illégale des terres pour l’exploitation minière, la déforestation, la destruction des terres, la perte de biodiversité, l’accélération de l’érosion et de la sédimentation des sols, la pollution de l’eau et de l’air ou encore le pillage de sites officiellement alloués à des compagnies industrielles.
Une menace sérieuse pour le secteur du cacao
Selon le Conseil ghanéen du cacao (Cocobod), le Galamsey devient une menace sérieuse aux rendements du secteur du cacao. En effet, il entraine la destruction de vastes étendues de terres forestières et de plantations de cacao, ainsi que la pollution des rivières et des sources d’eau, ce qui a eu un impact négatif sur la production de cacao.
D’après le Cocobod, le phénomène a conduit en 2021 à la destruction de plus de 19 000 hectares de plantations de cacao, soit l’équivalent de 2% du verger national.
D’après le Cocobod, le phénomène a conduit en 2021 à la destruction de plus de 19 000 hectares de plantations de cacao, soit l’équivalent de 2% du verger national.
Pour la campagne 2021/2022, le Galamsey est cité parmi les principales causes des mauvaises performances du secteur. Un autre chiffre du Cocobod rapportés par différents médias ghanéens, le phénomène aurait fait perdre 4,8 milliards de cedis d’investissements dans 35 hectares de plantations de cacao à Boinso, dans la région occidentale.
Expliquant l’impact de l’exploitation minière illégale sur le secteur du cacao dans des propos relayés par Mongabay, Joseph Boahen Aidoo (DG du Cocobod) a indiqué que la destruction des fermes par le Galamsey est plus courante dans les régions Ashanti, orientale, occidentale, qui abritent plus de 90% de la production de cacao du pays. Les terres non encore exploitées sont endommagées. En outre, les produits toxiques utilisés dans leurs activités entrainent également une pollution des cours d’eau.
« Maintenant, les mines ont transformé nos cours d’eau en boue toxique. À cause de cela, nous ne pouvons pas obtenir d’eau pour nos activités.»
« L’exploitation minière affecte beaucoup la communauté. Il y avait des rivières propres ici, que nous utilisions pour arroser nos fermes […]. Maintenant, les mines ont transformé nos cours d’eau en boue toxique. À cause de cela, nous ne pouvons pas obtenir d’eau pour nos activités […]. Nous utilisons désormais la réserve communautaire. Nous remplissons notre voiture d’eau et l’utilisons pour arroser nos arbres de cacao, mais cela coûte beaucoup d’argent. Si on additionne tout, les dépenses sont supérieures aux revenus », renchérit Sefah Abdul Razak, secrétaire de la communauté des producteurs de cacao d’Agroyesum.
Multiplier les efforts pour lutter contre le phénomène
Pour venir à bout du problème que constitue le Galamsey, l’Etat met en œuvre une stratégie basée à la fois sur la répression et la proposition de moyens alternatifs de subsistance aux personnes qui s’adonnent à cette pratique, les résultats tardent à se faire sentir.
« Les terres non encore exploitées sont endommagées.»
Les données sur l’impact de l’exploitation minière artisanale illégale sur le secteur du cacao rendent encore plus urgentes les actions du gouvernement pour mieux encadrer l’activité. Rappelons en effet que le pays est deuxième producteur mondial de cacao derrière la Côte d’Ivoire, et que le secteur contribue à hauteur de 9% à son produit intérieur brut en plus de créer des centaines de milliers d’emplois.