« C’est un incident grave qui pourrait déboucher sur plus de tensions », souligne sur franceinfo mardi 14 mars 2023 le général Jérôme Pellistrandi après qu’un drone américain a été abattu en mer Noire. Washington accuse les Russes d’être à l’origine de cet incident. La Maison Blanche dénonce un acte « irréfléchi ». De son côté, l’armée russe dément toute implication.
Le général français note que ce drone était suivi depuis « 30 à 40 minutes » par deux appareils russes. Jérôme Pellistrandi, rédacteur en chef de la revue Défense nationale, affirme que nous sommes en face d’une « action délibérée de la part des Russes » qui intervient « au plus mauvais moment ».
franceinfo : Avec cet incident, allons-nous vers une escalade des tensions ?
Jérôme Pellistrandi : C’est un incident extrêmement sérieux. Le drone américain, le drone Reaper, c’est un appareil qui fait à peu près 20 mètres d’envergure, donc c’est un gros engin qui est facilement repérable. Il semblerait que les deux avions russes le suivaient depuis 30 à 40 minutes. C’est donc bien une action délibérée de la part des Russes et cela traduit l’extrême niveau de tension. Les conversations entre les pilotes et les organismes de contrôle russes ont dû être enregistrées par les Américains. Ils ont également d’autres informations qu’ils n’ont pas dévoilées sur cet incident. C’est un incident grave qui pourrait déboucher sur plus de tensions. On verra dans les jours à venir quelles seront les suites données à cet incident.
Quelles pourraient être les conséquences ?
On voit très régulièrement des avions de l’OTAN, des avions américains, des avions britanniques, des avions français qui surveillent toute la zone située à l’Est, donc en particulier autour de l’Ukraine et de la mer Noire. Cette pratique est courante et nécessaire, car elle permet d’avoir de l’information et de savoir ce qui se passe, notamment du côté russe. Mais on le sait, c’est un espace aérien qui peut être disputé. Là, visiblement, les Russes ont voulu envoyer un signal. Mais un signal qui tombe au mauvais moment. D’autant plus que visiblement, le drone est tombé donc au milieu de la mer Noire, c’est-à-dire dans une zone qui n’est pas sous une juridiction russe. C’est donc un acte délibéré. C’est la raison pour laquelle l’ambassadeur russe a été immédiatement convoqué à Washington.
Le ministère russe de la Défense précise, selon lui, que le drone est entré dans une zone particulière, l’espace aérien établi pour mener l’opération militaire spéciale, ce qui a entraîné son interception. De quoi s’agit-il exactement ?
La mission des drones utilisés par les Américains, mais aussi par l’OTAN, c’est de recueillir du renseignement pour savoir ce qui se passe. Mais il faut souligner qu’à aucun moment le drone n’est rentré dans l’espace aérien russe, d’autant plus que ce type de drone est facile à intercepter. Il vole environ à 1 000 km/h, c’est très peu. Il est gros et donc il est hors de question de pénétrer à l’intérieur de l’espace aérien russe. Les Russes disent qu’il s’agit d’une zone qui était dédiée à l’opération spéciale militaire. Mais en termes de droit aérien, cela n’a aucune valeur puisque de toute façon, car l’espace aérien ukrainien est interdit à toute circulation aérienne et les Russes ne peuvent pas invoquer de contrôler une part de l’espace aérien international sous prétexte d’une opération spéciale militaire.
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