Burkina Faso: la France annule le décret d’extradition de François Compaoré
21 décembre 2023
Le 7 septembre dernier, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) avait demandé aux autorités françaises de réexaminer leur décret d’extradition. La Cour estimait que François Compaoré encourait un risque de violation de ses droits fondamentaux s’il était renvoyé vers Ouagadougou. Elle citait l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme interdisant la torture, ainsi que des peines ou des traitements inhumains ou dégradants. Le gouvernement français dit faire suite à cette décision, et le décret d’abrogation a été signé le 13 décembre par la Première ministre, Élisabeth Borne.
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« Le contexte a changé » à Ouagadougou, a expliqué, selon l’Agence France-Presse, le président de la Chambre des extraditions de la cour d’appel de Paris, lors d’une audience hier sur la levée du contrôle judiciaire qui pèse sur François Compaoré depuis 2017, référence claire au double coup d’État de 2022 dans le pays.
Très influent durant les vingt-sept années de présidence de son frère, François Compaoré est poursuivi pour l’assassinat du journaliste d’investigation Norbert Zongo et de trois hommes qui l’accompagnaient, le 13 décembre 1998. Il avait été arrêté en 2017 à l’aéroport de Paris-Roissy, en exécution d’un mandat d’arrêt international lancé par la justice du Burkina. Malgré plusieurs recours, son extradition avait été autorisée en 2020 par le gouvernement français, qui est donc revenu sur sa décision en s’alignant sur l’arrêt de la CEDH.
Joint au téléphone par François Mazet, du service Afrique de RFI, Me Propser Farama, l’avocat de la famille Zongo, estime que l’on s’achemine donc vers un jugement par défaut de François Compaoré. Il espère qu’un procès pourra se tenir rapidement. « La France avait la possibilité de demander un nouvel examen de l’affaire devant la Grande chambre, la Cour européenne devant l’homme. Nous l’avons espéré pour que nous ayons une autre chance à devoir réexaminer cette affaire. C’est une décision souveraine, mais donc c’est une décision à respecter », constate-t-il.
Quel recours existe-t-il encore, selon le défenseur de la famille Zongo ? « Je pense que sur ce terrain, rien n’est plus possible pour nous, puisque, après l’abrogation de cet arrêté d’extradition, la France aura, d’une façon ou d’une autre, clôturé définitivement ce chapitre. Donc, il restera à regarder plutôt la piste d’un jugement par défaut par contumace de François Compaoré, poursuit l’avocat. On s’achemine vraisemblablement vers un jugement sans l’une des parties principales de cette affaire. C’est simplement dommage parce que nous aurions espéré que nous ayons un jugement où toutes les parties de façon libre, indépendante et contradictoire, puisse donner leur version des faits. Parce que, ce qui importe le plus dans cette affaire, plus que de juger, est d’avoir la vérité. Mais à l’impossible, je pense que nul n’est tenu. »