Bah Oury: «On va tout faire pour que la Guinée évolue dans une dynamique de dialogue»

Bah Oury: «On va tout faire pour que la Guinée évolue dans une dynamique de dialogue»

12 juin 2024 Non Par LA RÉDACTION

 

C’est la première réaction d’un homme d’État africain à la poussée de l’extrême droite aux élections de dimanche dernier en Europe et en France. Et c’est sur RFI. Le Premier ministre guinéen est notre invité ce matin. Il s’exprime aussi sur le calendrier du retour à l’ordre constitutionnel dans son pays, et sur ses relations avec le président de la transition, le général Mamadi Doumbouya. Que pense-t-il du score du Rassemblement national en France ? Est-il prêt demain à rencontrer un Premier ministre issu de ce parti ? En ligne de Conakry, le

C’est la première réaction d’un homme d’État africain à la poussée de l’extrême droite aux élections de dimanche dernier en Europe et en France. Et c’est sur RFI. Le Premier ministre guinéen est notre invité ce matin. Il s’exprime aussi sur le calendrier du retour à l’ordre constitutionnel dans son pays, et sur ses relations avec le président de la transition, le général Mamadi Doumbouya. Que pense-t-il du score du Rassemblement national en France ? Est-il prêt demain à rencontrer un Premier ministre issu de ce parti ? En ligne de Conakry, le Premier ministre Bah Oury répond aux questions de Christophe Boisbouvier.

RFI : Les militaires du CNRD se sont d’abord engagés à rendre le pouvoir à la fin de cette année. Mais il y a trois mois, vous nous avez dit, sur RFI, que ce serait reporté à l’année prochaine. Est-ce qu’aujourd’hui, vous avez plus de précisions ?

Bah Oury : Bon, vous savez que le retour à l’ordre constitutionnel est conditionné principalement par l’établissement d’un fichier électoral fiable, c’est la raison pour laquelle nous avons adossé l’établissement du fichier sur la base du fichier d’état civil.

Alors un fichier d’état civil, ça nécessite qu’on refasse un recensement général et ce recensement, il va prendre combien de temps ?

Le fichier d’état civil, c’est un long processus, mais puisque le président a indiqué qu’il faut nécessairement le référendum à la fin de l’année, il va de soi que nous aurons une masse suffisamment représentative du corps électoral, et à partir de là, le fichier électoral sera établi pour permettre de tenir cet engagement présidentiel.

Et ce retour à l’ordre constitutionnel, il aura lieu quand ?

Pour ne pas donner une date de manière précise, ce que je peux dire, à partir du moment où nous aurons le référendum constitutionnel, tout le reste pourra se faire parce que les conditionnalités les plus difficiles seront derrière nous.

Il y a trois mois, vous nous avez dit « retour à l’ordre constitutionnel en 2025 ». Est-ce que vous confirmez aujourd’hui ? Ou est-ce que vous envisagez un report à 2026 ?

L’essentiel, dès que le référendum constitutionnel sera établi, tout le reste du chronogramme pourra être envisagé de manière certaine.

Et vous êtes certain que ce référendum aura lieu avant le 31 décembre ?

C’est un objectif que le président nous a fixé et c’est un objectif que le Premier ministre est en train de veiller à ce que cela soit, même s’il faut travailler 25 h sur 24 pour que l’agenda fixé par le président soit respecté.

Que répondez-vous à votre ancien compagnon politique, Cellou Dalein Diallo, aujourd’hui chef de l’opposition, qui dit que les principales décisions ne sont pas prises à la primature et qu’en fait vous vous faites l’avocat des militaires du CNRD ?

Bon, il doit savoir que je ne suis pas le genre de personne qui avalise n’importe quoi et j’agis en conscience. Et dans le contexte actuel, on ne peut pas dissocier l’action du CNRD, qui est l’organe d’orientation, de l’action du Premier ministre, chef du gouvernement, et de l’action du gouvernement dans sa globalité.

Donc, vous n’êtes pas un Premier ministre potiche ?

Oh, ce n’est pas mon genre. Je jouis de la confiance du président Doumbouya et je jouis de la confiance de l’écrasante majorité de la population pour permettre à la Guinée d’avancer.

Quelle est votre réaction à la poussée électorale de l’extrême droite en Europe et en France ?

Bon, je ne me mêle pas de la politique intérieure française, mais avec cette montée des populismes, cette radicalisation contre les populations immigrées, c’est une question qui nous interpelle. Nous avons des populations africaines qui sont en Europe qui sont nombreuses. La situation nous préoccupe. D’où l’indispensable nécessité pour les dirigeants africains de créer des conditions idoines pour que leurs ressortissants puissent travailler dans leur propre pays et que notre gouvernance soit une gouvernance vertueuse.

Et si le mois prochain, le leader du Rassemblement national, Jordan Bardella, devient Premier ministre de la France, est-ce que cela changera quelque chose dans les relations entre Paris et ses partenaires africains ?

Vous savez, devant les épreuves du pouvoir, le réalisme finit toujours par l’emporter. Donc, ça ne nous inquiète pas outre mesure et nous savons que nous traiterons avec n’importe quel gouvernement de la République française et voire même de l’Europe.

Donc pour vous, Emmanuel Macron ou Marine Le Pen, c’est pareil ?

Non, vous savez, entre le bleu clair et le bleu ciel, ce n’est pas tout à fait la même chose, mais en fonction des couleurs, vous allez porter des verres teintés ou pas.

Et là, vous porterez des verres teintés ?

[Rires] J’espère une avancée démocratique, je sais que la société française est très ouverte sur les réalités du monde et je ne suis pas pessimiste outre mesure.