Audition de Moussa Diakité, ancien ministre de Sékou Touré
4 avril 2024Nous sommes en décembre 1984, neuf mois après la chute du régime du premier président de la république de Guinée, Ahmed Sékou Touré , qui est resté au pouvoir pendant 26 ans , est mort à Cleveland( dans l’Ohio) , et a été enterré le vendredi 30 mars 1984 à Conakry. Quatre jours plus tard, le 03 avril 1984, l’armée guinéenne prenait le pouvoir et ordonnait , entre autres choses, l’arrestation des principaux dignitaires de la 1ère république, ainsi que des proches parents du défunt président. Parmi les personnes détenues , figuraient l’épouse de Sékou Touré André Touré, leurs enfants Aminata et Mohamed, les frères Ismaël et Amara, les sœurs Ramata et Nounkoumba , les cousins et neveux Siaka Touré, Mandiou Touré, les beaux frères par alliance Mamadi Kéita et Seydou Kéita, ainsi que les proches collaborateurs du défunt président Sékou Chérif , Damantang Camara, Moussa Diakité, Toumany Sangaré , etc.
Audition de M. Moussa DIAKITE ancien ministre (1963-1984).
Membre anonyme de la Commission d’enquête :
Vous aviez dénoncé le chef du régime défunt causé par l’improvisation, la méfiance et la concentration de tous les pouvoirs au niveau du président défunt. Et pourtant vous aviez été dignitaire de ce régime défunt parce qu’ayant appartenu au Bureau Politique National, organe de conception des programmes de développement de notre pays. Ne vous sentez vous pas à ce titre un peu responsable moral de cet échec ?
Moussa DIAKITE:
Effectivement, oui, j’ai répondu à la question que vous aviez posée à cette époque-là; ça veut dire que vous avez échoué? J’ai dit oui nous avons échoué. Mais je n’ai pas voulu développer ma conception de l’échec. Pourquoi? Parce que je comprenais très bien que le peuple critiquait le régime et que nous n’avons aucune raison de nier qu’il y avait des critiques justifiées, et nous- mêmes nous nous ouvrions à ces critiques. Parce que tout régime qui dure, même le vôtre après 26 ans, vous accepterez des critiques. Je me sens me dire vous êtes un peu responsable, je me sens responsable puisque j’étais partie prenante dans les décisions. Mais la manière dont elles étaient prises, vous le savez tous, il y avait des CRL, il y avait beaucoup de rassemblements et les décisions étaient ainsi prises, ce n’est pas pour le critiquer, on était là mais c’est la vérité. Maintenant je dois dire quelque chose en plus, il n’y a pas de régime au monde qui ne soit pas critiqué, il n’en existe AUCUN. Mais on sera toujours en train d’admirer l’autre régime. Les guinéens sont (…), ont la Côte d’Ivoire comme mirage ou le Sénégal ou d’autres pays. Quand vous allez aussi en Côte d’Ivoire, on vous dira la Guinée, ce sont des dirigeants courageux, on dira beaucoup de bien. Même si les gens sont contre vous, ils vous le diront! Maintenant sur le plan économique, l’échec était inévitable. Non seulement il y avait des improvisations, mais il y avait des facteurs, il y avait des causes que personne ne pourra maîtriser, même le régime actuel ne pourra pas maîtriser. Il y a d’abord la crise mondiale qui nous met en état de faiblesse, surtout nous les pays non développés en état de faiblesse devant les pays développés, qui continuent à nos exploiter. La détérioration des termes de l’échange par exemple. Figurez-vous même après la guerre, ce que 1 kg de riz pourrait rapporter comme mètre de percale ou mètre de cotonne pour le paysan. Mais actuellement, ça ne fait même pas le dixième. Vous avez la sécheresse qui est tombée sur nous depuis bientôt (…) depuis 1973. Le paysan vous dira tous les jours << ah je n’ai pas eu de riz parce que il y avait la sécheresse ». Ou on dira, pour les villages qui se trouvent au bord des fleuves, il y a eu l’inondation parce qu’avec la déforestation, que le sable s’est rependu et quand l’eau vient stagner, ben le riz est pourri. On a qu’à prendre les statistiques de n’importe quel pays de cette zone-là vous verrez, que la production ne fait que dégringoler. Lorsqu’on prend les autres facteurs, le prix du pétrole que nous ne contrôlons pas, qui fait que le gouvernement n’est pas en mesure de commander les quantités d’engrais qu’il faut pour donner aux paysans, ou aux planteurs parce que le prix du pétrole a été multiplié par 3 par 4 par 5 par 6. Puisque les engrais chimiques sont à base d’hydrocarbures, de pétrole, donc les prix des engrais ont augmenté, les paysans ont quitté, les planteurs ont abandonné leurs plantations, ils sont tous partis. On n’exporte plus de bananes, exporte que peu d’ananas.
on Comment voulez-vous qu’on puisse avoir de l’argent pour acquérir de nouveaux équipements et développer le pays? Tous ces facteurs nous échappent, la crise mondiale nous échappe. On a aucun moyen pour y parer. La sécheresse nous échappe. On a aucun moyen pour y parer. La dégradation des termes d’échange nous échappe. Parce que c’est eux qui fixent les prix à l’excès, ce n’est pas nous. Monsieur, voilà ce que j’avais à répondre, sur ce plan en vous disant que je ne dis pas que je n’ai pas une part de responsabilité. Puisque nous aurions pu, peut-être, démissionner. Nous ne l’avons pas fait. Mais pourquoi? Vous le savez vous-mêmes puisque vous êtes fonctionnaire de ce pays. Et nous le disons entre nous, nous nous connaissons. Qui aurait pu démissionner à cette époque-là? (RIRES EXTÉRIEUR). Personne. Puisque je ne veux pas abuser de votre temps je préfère m’arrêter. Mais la liste serait longue des facteurs et des causes qui nous échappent. Et les effets aussi que nous développons.
Membre anonyme de la Commission d’enquête :
A une époque vous avez été président de la commission d’enquête ?
Moussa DIAKITE:
Oui.
Membre anonyme de la Commission d’enquête : Vous avez dirigé les interrogatoires?
Quelle était votre méthode de travail? De l’information jusqu’à la décision finale.
Moussa DIAKITE:
Vous savez j’étais ministre de l’Intérieur mais vous savez aussi que le chef d’État n’a jamais fait confiance au ministère de l’intérieur. A chaque fois qu’il tenait une conférence vous le savez, quand on fait des recherches, sur les comploteurs et il disait bien « ce n’est pas la police qui va découvrir les comploteurs, quand le chercheur de l’aiguille a le pied posé sur l’aiguille, on ne retrouva jamais l’aiguille. Donc lorsqu’on se réunissait et lorsqu’on était désigné, on avait peur d’avoir été désigné. Puisque l’enquête était doublement. Quand vous réunissez, vous subdivisez en commission et en commission selon le nombre des accusés, on disait telle commission à un tel, telle commission à un tel, telle commission à un tel. Quelques fois le chef d’État il téléphone aux inculpés, et il dit que personne ne doit être retour. Et il cause avec l’inculpé et puis quand vous venez l’inculpé ne vous dira rien. Ou il envoie une lettre cachetée que personne ne doit lire et qu’on remet à l’inculpé, l’inculpé prend la lettre, la lit, fait…, une réponse la remet quelques fois au porteur, qui peut être un gendarme de la présidence. Et c’est à partir de là, la plupart du temps, qu’on nous dit « Ah attention, tel a avoué, tel a avoué, j’ai des documents, j’ai des documents » mais on ne sait pas comment il les a eus. Mais nous interrogions les inculpés, on leur posait la question. Et lorsque que le débat était assez approfondi pour ce qui me concerne, je dis donnez un papier à l’inculpé, je disais « allez dans votre cellule et dites-nous ce qui s’est passé. Voilà en ce qui me concentrent comment je pratique. Et quand je revenais il y en a certains qui écrivaient d’autres n’écrivaient pas, ou écrivaient peu. Nous posons les questions, on peut faire plusieurs heures de débats et après on leur disait encore de retourner dans leur cellule et de nous dire vraiment la responsabilité. Il y a beaucoup qui nous ont fait confiance et qui ont écrit, ou qui ont fait confiance au chef d’Etat. Qui ont écrit. Et c’est avec la somme de ces informations, que nous disons à l’intéressé de faire une déclaration unique et cette déclaration était déposée à l’officier chargé évidemment du
Camp Boiro et qui portait ça au chef de l’État.
Membre anonyme de la Commission d’enquête : Donc à votre temps il n’y a pas eu de torture?
Moussa DIAKITE:
Peut-être, mais jamais au niveau de la section, au niveau des séances que je présidais.
Membre anonyme de la Commission d’enquête :
Pendant que vous dirigiez la commission d’enquête, il n’y a pas eu de décès là-bas ?
Moussa DIAKITE :
Je ne sais pas, je vous assure que je n’ai jamais mis pied au Camp Boiro que lorsque j’ai été arrêté. Je veux dire, à la …, au lieu de détention. Au bloc vous pouvez interroger tous les gendarmes, je n’ai jamais mis un pied là-bas.
Membre anonyme de la Commission d’enquête :
S’il vous plaît, que savez-vous de l’assassinat de la sentinelle à la présidence?
Moussa DIAKITE:
Vraiment j’ai appris vaguement cette nouvelle, je ne l’ai même pas vérifié.
Membre anonyme de la Commission d’enquête :
Vous ne vous êtes jamais posé la question sur cette affaire ?
Moussa DIAKITE:
Je vous le jure.
Membre anonyme de la Commission d’enquête :
Est-ce que vous avez un compte bancaire à l’extérieur ?
Moussa DIAKITE :
Jamais depuis l’indépendance, jamais.
Membre anonyme de la Commission d’enquête :
Parce que c’est une liste de personnalités que nous avons devant nous ici, et sur cette liste votre nom figure, avec une adresse d’une banque donnée. Et faites-nous confiance ce n’est pas la Commission nationale d’enquête ni le Comité Militaire de Redressement National qui s’est fabriqué cette liste mais cette liste nous l’avons hérité du président défunt. Nous l’avons trouvé parmi ses documents les plus intimes. Elle n’a pas été fournie par un guinéen mais c’est parmi un de ses amis étrangers. Un informateur à lui. Cette liste fait état de vous à une banque qui se situe en Hollande. Vous dites que vous n’avez pas de compte là-bas.
Moussa DIAKITE:
Non. J’ai …je vous l’ai dit ici j’ai été grand conseiller de l’AOF à Dakar vice-président de rencontres, mes indemnités étaient virées. A partir du 28 septembre 1958, c’était terminé je n’ai jamais eu de…de compte à plus forte raison en Hollande. Je ne connais même pas la Hollande.
Je n’y ai jamais été.
Membre anonyme de la Commission d’enquête :
Si on est amené à vous le dire c’est parce que le CMRN et le président de la République a eu
arrêté la décision suivante: tous ceux qui ont leur nom sur cette liste soit il faut faire l’argent
qui se trouve à ses comptes là ou il restait définitivement en prison. Donc c’est raison pour
laquelle nous nous faisons le devoir de faire état de cela. (bruit dans la salle des gens parlent
pour apporter des précisons: il y a une confusion entre le nom de la rue « rue de Hollande >>>
qui semble être en Suisse).
Moussa DIAKITE:
J’ai été en 1962 seulement, quand nous avons été pour signer un accord de coopération, je ne
connais pas la Suisse et je n’ai AUCUN compte en Suisse. Si jamais cela pouvait être prouvé,
prouvé je dis, mais je ne demande pas de grâce, même si cela n’est pas, je vous demande de me
croire et de me libérer. Parce que je ne peux pas, je ne peux en aucun cas en tant que ancien
gouverneur de la banque, qui ait rédigé les textes, les violer par malhonnêteté. Et j’ai trop de
charge de famille pour faire cela. Et à mon âge, je ne sais pas pourquoi garder de l’argent.
Membre anonyme de la Commission d’enquête :
Une autre question, après le décès de l’ancien président, il y a eu quelques activités pour sa succession. Le Bureau politique national s’était réuni, et un candidat avait été désigné. En l’occurrence le feu Lansana BEAVOGUI. Et l’on se préparait à se réunir en Comité Central le 3 avril, quand il y a eu l’action de l’armée. Qu’est-ce que vous savez de cette situation? Parce que d’autres personnes font état, heu, des esprits qui voulaient un peu décharger le président de la République. Que le Président de la République ne soit plus, .., n’ait plus tant de pouvoir comme l’était au temps de Sékou Touré. Mais on avait envisagé qu’il y ait un vice-président.. un Premier ministre chef de gouvernement et un secrétaire général du parti. Alors qu’est-ce que vous en savez ?
Moussa DIAKITE:
Et bien vous usez vos informations avec des responsables que je ne connais pas. Mais moi
Membre anonyme de la Commission d’enquête :
…avec vos codétenus
Moussa DIAKITE:
je dois vous dire, moi, j’ai toutes les raisons d’aspirer à cette époque à la première magistrature. J’en ai aucune honte. Puisque sur le plan de l’ancienneté je le mérite. Et à tous les congrès, j’ai été reconduit à la deuxième place après le premier ministre. Mais nous savons que dans la situation que nous traversions, il n’est pas du tout indiqué qu’après avoir nous-mêmes, en congrès en 1972 à la réunion,… à la toute première réunion du Bureau politique donnant au Chef de l’Etat le pouvoir de créer un poste de Premier ministre. Et c’est là que le camarade Lansana BEAVOGUI a été désigné. Et ce n’est pas moi qui le contesterais. Parce que, il avait des qualités certaines. Mais ce qui s’est passé véritablement, c’est que après le décès de l’ancien président, mon souci personnel était de faire respecter la Constitution. Parce que c’est moi qui ai rédigé la Constitution, je me sens responsable du respect de la Constitution. Je l’ai rédigé il y a eu peu de modifications. Et j’ai nous l’avons écrit: en cas de décès ou de disparition du chef de l’État, le gouvernement restait en place. Jusqu’à, aux prochaines élections après 45 jours. C’est moi qui l’ai rédigé. Donc c’est moi qui ai proposé que la Constitution soit respectée, et qu’on ajoute Lansana BEAVOGUI est chef du gouvernement. Puisque le gouvernement reste en place. Il reste premier ministre mais personne d’autre ne changeait de portefeuille, et nous ne créons pas auprès de lui un poste de Premier ministre. Pourquoi? Parce que nous avons dit : la Constitution dit que le gouvernement reste en place jusqu’à la fin des 45 jours. Donc nous n’avons pas de modifications à apporter à, au gouvernement qui existait. Et nous avons done décidé, Lansana BEAVOGUI, Premier ministre, chef du gouvernement. Et nous avons fait le communiqué avant même que n’arrive les camarades qui avaient accompagné le chef de l’… l’ancien chef de l’État malade. Il y avait trois membres du Bureau politique qui étaient absents mais nous avons dit puisque la Constitution dit qu’après tant après la constatation de la disparition immédiatement, il fallait déclarer que le gouvernement est responsable maintenant de la situation pour préparer les élections dans les 45 jours. Et après les 45 jours, après les élections, si maintenant le président élu devait constituer le gouvernement, nent, c’était à lui à créer les postes dont vous parlez. Mais on ne peut pas parler de ces postes là avant les élections selon nous. C’est pourquoi il n’y a eu aucune, aucune discussion à cet égard.
Membre anonyme de la Commission d’enquête :
En 1960 il y a eu une conférence à Kankan autour du plan triennal (…) du 1 plan triennal à laquelle assistait un certain monsieur << Declercq »… alors il aurait fait un projet de plan pour la Guinée le premier plan pour la Guinée. Si vous avez souvenance, peut-on savoir pourquoi ce plan a été fondamentalement rejeté? Pouvez-vous nous expliquer les raisons?
Moussa DIAKITE:
Vous savez, après la création de la monnaie le gouvernement modifié un peu le gouvernement et a créé un poste de ministère de plan. N’Famara a été désigné Ministre du Plan. Et le camarade défunt qui avait aussi des grandes idées, nobles, a demandé au chef d’État de lui permettre de se faire assister par des spécialistes de la planification. Nous avons fait appel d’ailleurs à des hommes d’un niveau extrêmement élevé. Il y avait l’un dont vous parlez, qui est Mathiste. Vous avez René Dumont qui a fait ce fameux livre dont on parle beaucoup << L’AFRIQUE EST MAL PARTIE ». Et après quelques mois de travail le camarade N’Famara a présenté un projet. L’ancien chef d’Etat a soupçonné que ce projet était d’inspiration de Bethlehem et qui était Mathiste et qui ne s’en cachait pas. Mais nous disons bien que pour nous le plan n’avait rien de Mathiste puisque c’est un plan intérimaire de trois ans alors que le premier plan nous voulions leur donner une durée de 7 ans. Mais que pour une première donnée il fallait absolument faire un plan intérimaire, c’est-à-dire qui devait ramasser les problèmes les plus urgents qui se posent et qui devait les résoudre dans un temps déterminé. C’est ce qu’on appelait alors le plan triennal. Bethlehem dans le rapport peut-être qu’il a inspiré voulait d’abord qu’on commence par briser les anciennes structures de régime coloniale. C’était le fondement de ce plan. Qu’il fallait mettre en place les infrastructures administratives puisqu’il y a des Régions qui n’ont pas d’infrastructures. Donc briser les structures de l’Ancien Régime colonial c’est d’abord refondre tous les textes et mettre en place de nouvelles structures et à partir de ce plan faire des créations. Voilà ce qui y’avait dans ce plan. Mais le chef de l’Etat évidemment s’était énervé pendant la discussion et il avait peut-être eu d’autres informations mais cela ne résultait pas du tout des textes du plan. Il a dit que la Guinée n’est pas communiste et que jamais la Guinée ne sera communiste il l’a déclaré et que nous sommes nous défenseurs de la situation des pays en développement nous ne voulons pas nous couper des autres pays en nous targuant les communistes, premièrement. Deuxièmement nous sommes des musulmans convaincus, des croyants. Et ce jour-là il a pris à partie notre camarade de faiblesse de s’être laissé dominé par les planificateurs considérés comme des savants. Voilà vraiment ce qui s’est passé en résumé au cours de cette conférence.
Membre anonyme de la Commission d’enquête :
Donc il n’a eu aucune pression sur le chef de l’Etat lui-même ?
Moussa DIAKITE:
Non! Aucune pression.
De quelle pression par exemple ?
Membre anonyme de la Commission d’enquête :
Interne. De certains guinéens, à l’époque à l’intérieur du gouvernement.
Moussa DIAKITE :
Non! Vous savez, nous, à l’époque nous étions jeunes. Et moi on me targuait de communiste et je n’en avais pas honte. Parce que ça correspondait à une époque…
Membre anonyme de la Commission d’enquête :
Mais je parle de l’autre côté, on dit qu’il y avait certains qu’ils n’étaient pour le plan parce qu’il était un peu communisant…
Moussa DIAKITE
Non, c’est dans les archives, vous pouvez voir le plan. C’est un plan intermédiaire. C’était plan
un plan véritablement définitif.
Membre anonyme de la Commission d’enquête :
Moi j’ai une dernière question. C’est pour savoir pourquoi le délai de 45 jours n’a pas été
respecté ?
Moussa DIAKITE
Ah, il faut poser la question à ceux qui ont fait le coup d’Etat.
Membre anonyme de la Commission d’enquête :
Non parce qu’on a pris un discours d’investiture pour le 3 avril.
Moussa DIAKITE
Hein ?
Membre anonyme de la Commission d’enquête :
Un discours d’investiture de feu Lansana BEAVOGUI comme président de la République.
Moussa DIAKITE
Ah, peut être… je n’ai pas lu son discours mais ce qui était certain, nous voulions à un moment peut-être abréger les, les…le délai c’est-à-dire que en réunissant le Comité central. En réunissant l’Assemblée nationale populaire il y avait dans la Constitution ce qu’on appelait l’assemblée suprême. Voilà donc l’Assemblée suprême pouvait prendre n’importe quelle disposition à n’importe quel moment quand les événements l’exigent. Voilà donc nous avons décidé après avoir investi le camarade BEAVOGUI, ne laissons plus les bruits qui courent en disant que nous nous entendons pas.
Parce que nous avons entendu ce bruit, et vraiment ça nous faisait c’était ridicule pour nous. Parce que s’entendre ou ne pas s’entendre, l’essentiel était de sortir une décision. Elle était sortie. Donc nous avons dit donnons maintenant à cette décision sa valeur législative, pleine et entière en convoquant maintenant toutes les institutions réunies, ce qui est prévue dans la constitution. Et si les institutions approuvent la désignation du camarade Lansana BEAVOGUI, donc les institutions sont en mesure de dire nous allons maintenant proclamer Lansana BEAVOGUI Président de la République et cela jusqu’aux élections et à d’autres. ambitions…voilà ce qui a motivé notre prise de décision.
Membre anonyme de la Commission d’enquête :
(…) cette déclaration… il y’en a qui n’étaient pas d’accord. (Discussion entre les membres de la commission)… contrepropositions….des gens qui étaient d’accord avec vous quand vous êtes en réunion mais quand vous sortez des réunions, qui entretenaient d’autres démarchent …on pensait que Secrétaire général du parti, Président de la République, chef de gouvernement c’était un peu une concentration, une forme de concentration du pouvoir dans les mains d’un seul homme
Moussa DIAKITE
Mais voilà ce qui s’est vraiment passé en ce qui concerne ce problème de décentralisation. Lorsqu’on a investi le camarade BEAVOGUI comme chef de gouvernement intérimaire, nous avons dit que nous ne désignons pas de premier ministre. Vaut mieux supprimer le poste. Nous supprimons le poste et en ce moment-là, nous nous trouvons dans la même situation qu’au Sénégal, que le Cameroun. On a dit un régime bicéphale en Afrique ne se juge pas. Voilà l’argument qui a été avancé. Mais d’autres, peut-être, sous-estimaient le Président élu en disant qu’il n’avait pas évidemment toute l’énergie, et toute la compétence et l’expérience. Par conséquent il était bon de lui trouver quelqu’un qui l’assisterait. Evidemment il faut faire la part des choses, il y avait la presse, il y avait la radio Paris qui disait beaucoup de choses de chacun de nous. On disait même que j’étais candidat. Je l’ai lu dans le journal (…)
Moussa Diakité (né dans les années 1920 et mort en juillet 1985), était un homme politique guinéen, principalement durant la présidence de Ahmed Sékou Touré. Il était également membre du cabinet de la Première République de Guinée
Sa femme, Tata Keïta, était la demi-sœur de la femme du Président, Andrée. Son fils épousa la fille aînée d’Ismael Touré, le frère du Président.
En mars 1952, Diakité se présente lors d’une élection dans le Kankan sur la liste du RDA, alors que Ahmed Sékou Touré se présente en Guinée forestière. Les deux hommes sont battus.
Après que Touré est devenu le premier Président de Guinée suite à l’indépendance de 1958, Diakité occupe plusieurs postes ministériels tels que la Justice, l’Intérieur ou le Commerce.
Il est membre de la commission d’enquête de Camp Boiro, où il conduit l’enquête secrète qui mène à l’exécution de Diallo Telli (par privation de nourriture et d’eau), qui meurt le 1er mars 1977.
Diakité est arrêté le 3, une semaine après la mort de Touré.
Il est exécuté après le coup d’état de Diarra Traoré, en juillet 1985.
Transmis par l’AVCB