Au Soudan, des milliers de civils fuient Khartoum au cinquième jour des combats
19 avril 2023Malgré la pénurie de carburant, des milliers de civils tentent de fuir Khartoum sous les bombes vers des régions plus calmes. Les chancelleries au Soudan tentent d’organiser des transports pour leurs ressortissants. Plusieurs centaines de Français vivant sur place ont reçus la consigne de rester « confinés chez eux ».
Les combats qui continuent de faire rage, mercredi 19 avril, dans la capitale soudanaise ont poussé des milliers de civils à fuir Khartoum. Les échanges armés entre les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) et l’armée régulière ont fait près de 200 morts au Soudan en quatre jours.
À pied ou en voiture, sur des routes jonchées de cadavres et de blindés calcinés, des milliers de Soudanais tentent de passer sous les tirs croisés des FSR du général Mohamed Hamdane Daglo, dit « Hemedti », et de l’armée que dirige le général Abdel Fattah al-Burhane, aux commandes depuis leur putsch conjoint de 2021.
Depuis samedi, la communauté internationale appelle au dialogue. Mais les deux hommes restent sourds aux appels au cessez-le-feu ou au moins à une trêve temporaire pour évacuer les civils des quartiers les plus dangereux.
Des frappes aériennes et des explosions ont en effet touché mercredi la capitale du Soudan, actant de l’échec du bref cessez-le-feu débuté mardi soir entre l’armée et les forces paramilitaires.
Selon une habitante des quartiers Est de Khartoum, ces combats intenses ont repris tôt mercredi matin, après des frappes aériennes et des tirs d’artillerie la veille.
Les pénuries menacent Khartoum
Alors que les combats connaissent parfois de brèves accalmies, le plus souvent le temps de recharger des munitions ou de se déplacer de quelques rues, chaque jour des grappes de familles sont parvenues à sortir de la capitale.
« Mais la plupart des stations-service sont à sec », indique sur place Augustine Passilly, journaliste indépendante, qui a échangé avec des familles en quête d’essence pour aller se réfugier dans des régions plus calmes.
Dans la capitale soudanaise, la vie quotidienne n’est plus tenable depuis samedi. L’électricité et l’eau courante ont disparu et ne reviennent que quelques heures à peine en certains endroits.
« Certains centres d’approvisionnement en eau et en électricité ont été endommagés (…). Le quartier résidentiel de Riyad, dans l’est de Khartoum est ainsi privé d’eau et d’électricité depuis 48 heures. La solidarité s’organisent avec les voisins équipés d’un générateur électrique qui fonctionne encore. Mais ces derniers vont bientôt manquer de carburants pour le alimenter », détaille Augustine Passilly.
Balles perdues et hôpitaux fermés
Sur le plan sécuritaire, des balles perdues transpercent régulièrement un mur ou une fenêtre. Pire, parfois un missile venu du ciel réduit un immeuble ou un hôpital à un tas de gravats.
Quant aux stocks de nourriture, traditionnellement limités dans un pays où l’inflation est galopante, ils ne font que fondre et plus aucun camion d’approvisionnement n’est entré dans la capitale depuis samedi.
Déjà lundi soir, l’ONU recensait près de 200 morts, plus de 1 800 blessés, et tous les médecins le répètent, aucun bilan n’est fiable tant le champ de bataille est dangereux : de nombreux corps et de nombreux blessés n’ont pas encore été trouvés.
Les combats ont déjà fait fermer sept hôpitaux à Khartoum, rapportent des médecins, alors que la plupart des autres ne peuvent plus opérer : parce qu’ils n’ont plus de matériel, parce que des combattants les occupent ou parce que les soignants, pris sous les tirs, n’ont pas pu prendre leur poste.
« Plusieurs centaines » de ressortissants français coincés au Soudan
Dans ce contexte, les chancelleries au Soudan tentent d’organiser des transports pour leurs ressortissants, mais leur tâche est compliquée par les attaques.
Lundi, un convoi diplomatique américain a essuyé des tirs, l’ambassadeur de l’Union européenne a été « agressé dans sa résidence » à Khartoum et le patron belge de la mission humanitaire de l’UE a été « hospitalisé » après avoir été touché par balle.
Interrogée sur Franceinfo, la porte-parole du ministère français de l’Europe et des Affaires étrangères, Anne-Claire Legendre, a indiqué mercredi que « plusieurs centaines » de ressortissants français se trouvaient au Soudan et qu’ils avaient reçus la consigne de rester « confinés chez eux ».
Le ministère de la Défense japonais, quant à lui, a entrepris les « préparatifs nécessaires » pour l’évacuation d’une soixantaine de ressortissants, en coordination avec d’autres pays.
Une perspective qui pourrait encore être lointaine car les combats ont débuté à l’aéroport de Khartoum, désormais hors service.
Avec AFP et Reuters