Assassinat de Thomas Sankara : ce qu’il faut retenir du premier jour du procès historique

Assassinat de Thomas Sankara : ce qu’il faut retenir du premier jour du procès historique

11 octobre 2021 Non Par LA RÉDACTION

 

Thomas Sankara, en 1986. © Pascal Maitre/JA

L’heure du procès a enfin sonné. Plus de trois décennies après l’assassinat du président burkinabè, le 15 octobre 1987, les audiences ont démarré devant le tribunal militaire de Ouagadougou. Revivez cette première journée grâce aux envoyés spéciaux de « Jeune Afrique ».

DANS CE DOSSIER

Assassinat de Thomas Sankara : l’heure du procès

15h33 – Les audiences suspendues jusqu’au 25 octobre 

Le président du tribunal, le juge Urbain Méda, a annoncé que les audiences reprendront le 25 octobre à 9h.

Les défenseurs des accusés réclamaient un délai plus long, d’un mois, afin que les avocats commis d’office puissent prendre connaissance du dossier. Le magistrat a estimé que quinze jours étaient suffisants, comme l’avait plaidé le procureur.

Par ailleurs, le tribunal a décidé de rejeter les demandes formulées par les avocats des parties civiles, qui souhaitaient que le procès soit filmé.

13h45 – Plusieurs semaines de procès

Alors que l’audience est suspendue depuis près de deux heures, nous allons clôturer ce live.

À retenir :

· Le procès s’est ouvert peu après 9 h dans la salle des Banquets de Ouaga 2000. Un dispositif exceptionnel a été mis en place. Environ 150 personnes assistaient à cette première audience, en grande majorité des journalistes, mais aussi des membres des familles de Thomas Sankara et des douze autres victimes de la tuerie du 15 octobre 1987 au Conseil de l’Entente.

· Douze hommes étaient dans le box des accusés, mais deux manquaient à l’appel : Blaise Compaoré, accusé d’être le commanditaire du crime, qui est en exil à Abidjan depuis 2014, et Hyacinthe Kafando, soupçonné d’avoir été à la tête du commando. Gilbert Diendéré, ancien chef d’état-major particulier de Blaise Compaoré, sera donc particulièrement scruté.

· Mariam Sankara, la veuve de l’ancien président, a fait le déplacement depuis Montpellier, où elle réside. Elle a regretté l’absence du principal accusé, Blaise Compaoré.

· Attendue depuis 34 ans par les familles des victimes, cette première journée d’audience était essentiellement consacrée au règlement de questions formelles. Les audiences doivent durer plusieurs semaines.

Retrouvez ici tous nos articles consacrés à ce procès historique.

12h45 – Absence de Compaoré : « Un vrai homme viendrait s’expliquer »

Mariam Sankara a fait quelques déclarations sur l’absence du principal accusé, l’ancien président burkinabè, Blaise Compaoré, à ce procès : « Blaise Compaoré a fui et ne veut pas rentrer [au Burkina Faso] pour répondre des faits qui lui sont reprochés. Un vrai homme viendrait s’expliquer », a dénoncé la veuve de Thomas Sankara.

Blaise Compaoré, 70 ans, est en exil en Côte d’Ivoire depuis qu’il a été renversé par un soulèvement populaire en 2014. Selon son avocat, Pierre-Olivier Sur, il refuse de répondre à cette cour car il s’agit d’un « procès politique ».

12h00 – Alouna Traoré : « Nos rêves de révolution »

Alouna Traoré, ancien collaborateur de Thomas Sankara et seul survivant de la tuerie du 15 octobre 1987, est présent au procès. « J’éprouve un sentiment de soulagement. On n’y croyait plus mais finalement ce procès se tient enfin. C’est une opportunité unique de rétablir la vérité, a-t-il déclaré à Jeune Afrique. Maintenant, nous voulons que justice soit faite. La justice ne pourra pas nous restituer les rêves de changement de la société que nous avions sous la révolution, mais elle pourra au moins restituer la vérité. Elle finira par être connue. Quant à nos rêves de révolution, c’est aux nouvelles générations de les porter désormais. »

11h55 – Suspension d’audience

L’audience a de nouveau été suspendue par le président Urbain Méda. Le juge veut consulter les parties sur le chronogramme de l’audience.

11h15 – Les « autres » accusés

Quatorze hommes sont inculpés et trois d’entre eux sont bien connus : Blaise Compaoré, l’ancien président burkinabè, qui est accusé d’avoir commandité le crime, Gilbert Diendéré, l’ancien chef d’état-major particulier de Blaise Compaoré, qui est accusé de l’avoir organisé, et Hyacinthe Kafando, qui est soupçonné d’être le chef du commando.

Pour en savoir plus sur les principaux accusés, lisez notre article.

Mais qui sont les onze autres ?

Trois hommes étaient gardes du corps de Blaise Compaoré au moment des faits et sont poursuivis pour « assassinat » : le caporal Idrissa Sawadogo, les soldats de première classe Nabonswendé Ouédraogo et Yamba Elysée Ilboudo.

Tout comme le sergent Bossobè Traoré, poursuivi pour « complicité d’attentat à la sûreté de l’État », ils officiaient au Centre national d’entraînement commando (CNEC) de Pô au moment des faits, en 1987. Créé par Thomas Sankara en 1976, ce centre situé dans le sud du Burkina, à la frontière avec le Ghana, avait dès le début la vocation de former et d’héberger les meilleurs militaires du pays. En 1987, il était dirigé par Blaise Compaoré, qui était secondé par Gilbert Diendéré.

Trois autres accusés servaient à Pô, cette fois-ci au sein de l’escadron motocycliste : le colonel Tibo Ouédraogo, l’adjudant-chef Albert Pascal Sibidi Belemlilga et Diakalia Démé.

Parmi les inculpés, il y a également Mori Aldjouma Jean-Pierre Palm, qui officiait au camp militaire de Bobo-Dioulasso, et le soldat Nina Tondé.

Enfin, il y a deux anciens médecins militaires : Alidou Jean Christophe Diébré et Hamado Kafando. Ce sont eux qui ont inscrit sur le certificat de décès de Thomas Sankara que le président du Faso était décédé de « mort naturelle ».

11h10 – Les assesseurs choisis

Après un nouveau débat sur les liens qui ont pu exister entre les assesseurs tirés au sort et les accusés, trois officiers supérieurs ont finalement été retenus comme assesseurs militaires titulaires pour composer la chambre. Il s’agit du colonel-major Boureima Ouédraogo, du colonel-major Alfred Somda, et du colonel Saturnin Poda.

10h45 – Thomas Sankara : derniers instants, derniers témoins, derniers secrets…

Le capitaine Thomas Sankara et le journaliste Sennen Andriamirado, à Paris, en 1986.
Le capitaine Thomas Sankara et le journaliste Sennen Andriamirado, à Paris, en 1986. © Pascal Maitre/Archives JA

« Il a à peine franchi la porte de la villa qu’il est littéralement canardé. Les assaillants étaient venus pour tuer ! » Dans Il s’appelait Sankara, paru deux ans après la mort de l’ancien président, Sennen Andriamirado, rédacteur en chef de Jeune Afrique et intime de l’ex-chef de l’État, faisait le récit des dernières heures de Thomas Sankara.

Retour sur ces heures du 15 octobre 1987 pendant lesquelles le Conseil de l’entente s’est transformé en terrain d’exécution :

10h30 – Urbain Méda, le juge

La chambre de première instance du tribunal militaire devant laquelle se tient le procès des assassins présumés de Sankara, le 11 octobre 2021.
La chambre de première instance du tribunal militaire devant laquelle se tient le procès des assassins présumés de Sankara, le 11 octobre 2021. © Benjamin Roger pour JA

L’homme qui a la lourde charge de présider les audiences de ce procès historique est Urbain Méda. S’il sera assisté de militaires, lui est un civil.

Il a été président du tribunal de grande instance de Ouagadougou, puis de ceux de Dori (dans le nord du pays) et Koudougou (à l’ouest de la capitale). C’est aujourd’hui en qualité de président de la chambre de première instance du tribunal militaire qu’il officie.

10h25 – Les révélations de Moussa Diallo, l’ex-aide de camp du « camarade capitaine » 

Moussa Diallo, officier à la retraite, ancien aide de camp de Thomas Sankara, ancien commandant adjoint de la gendarmerie nationale, en banlieue parisienne, le 8 septembre 2021.
Moussa Diallo, officier à la retraite, ancien aide de camp de Thomas Sankara, ancien commandant adjoint de la gendarmerie nationale, en banlieue parisienne, le 8 septembre 2021. © Vincent Fournier pour JA.

« En idéaliste qu’il était, il se pensait sûrement plus utile pour la cause mort que vivant ». Moussa Diallo, l’ancien aide de camp de Thomas Sankara était l’un des maillons essentiels du dispositif de l’ancien président burkinabè. Il a accepté de livrer son témoignage en exclusivité à Jeune Afrique 

Au-delà des anecdotes sur le « camarade capitaine » dont il fut l’un des plus proches collaborateurs, Moussa Diallo revient sur les semaines qui ont précédé l’assassinat du président burkinabè. La montée des tensions avec Blaise Compaoré, la manière dont Thomas Sankara faisait face, jusqu’à ce jour fatidique du 15 octobre 1987. L’intégralité de ce témoignage est à retrouver dans notre article ci-dessous.  

10h15 – Dispositif sécuritaire renforcé

Des policiers burkinabè devant la salle d’audience où s’est ouvert le procès des assassins présumés de Thomas Sankara, le 11 octobre 2021 à Ouagadougou.
Des policiers burkinabè devant la salle d’audience où s’est ouvert le procès des assassins présumés de Thomas Sankara, le 11 octobre 2021 à Ouagadougou. © Sam Mednick/AP/SIPA

Un dispositif sécuritaire renforcé a été mis en place autour de la salle des Banquets de Ouaga 2000 durant toute la durée du procès. Trois entrées sont prévues pour accéder à l’intérieur de la salle : une pour les magistrats et les officiels, une pour les accusés, et une pour le public.

Le port de tout vêtement, accessoire ou pancarte à l’effigie d’un des accusés ou d’une victime est interdit dans la salle d’audience, tout comme à ses abords.

10h00 – Problème d’assesseurs

L’audience a été suspendue à 9h40 car les deux généraux de brigade qui ont été appelés pour être assesseurs se sont récusés. Brice Bayala a mis en avant des raisons de santé et Ouedraogo Nazingouba sa proximité avec certains accusés, dont Gilbert Diendéré et Blaise Compaoré, dont il fut le médecin personnel.

Alors que les assesseurs doivent théoriquement être de grade égal ou supérieur à celui de l’accusé le plus haut gradé (en l’occurrence Gilbert Diendéré, qui est général), le juge a dû suspendre l’audience afin qu’une dérogation lui permettant de choisir des assesseurs de grade inférieur soit acceptée.

9h40 – Audience suspendue

L’audience s’est ouverte à 9h10 exactement, selon nos correspondants sur place. Le juge Urbain Méda, qui présidera les débats lors de ce procès, a fait son entrée dans la salle d’audience.

Il a d’abord lu l’ordonnance n°004 sur la  délocalisation du tribunal dans la salle des Banquets de Ouaga 2000 – une mesure exceptionnelle à la mesure de ce procès. Il a ensuite procédé à l’appel des accusés et constaté l’absence de deux d’entre eux – Blaise Compaoré et Hyacinthe Kafando.

Enfin, ce juge, qui est le président du tribunal de première instance, a demandé au greffier en chef de procéder au tirage au sort de trois juges militaires qui officieront en tant qu’assesseur et suppléants. Mais une difficulté est apparue qui a contraint à suspendre temporairement l’audience.

9h35 – [Vidéo] Trois minutes pour comprendre les enjeux d’un procès historique

Pourquoi a-t-il fallu attendre plus de trente ans pour que le procès s’ouvre enfin ? Quelles seront les conséquences de l’absence de Blaise Compaoré ? Pourquoi les thèses de la « main de l’étranger » dans l’assassinat de l’ancien président burkinabè ne sera pas abordée lors des audiences ?