Coran brûlé en Suède : Washington et Ankara condamnent , le Maroc rappelle son ambassadeur

29 juin 2023 Non Par LA RÉDACTION
Salwan Momika a été autorisé par la police à brûler un Coran devant une mosquée de Stockholm le 28 juin 2023, pendant la fête de l'Aïd al-Adha.

 

Une manifestation en janvier au cours de laquelle un Coran avait été brûlé devant l’ambassade de Turquie avait suscité la colère d’Ankara, qui bloque la candidature du pays scandinave à l’Otan.

Un homme a brûlé quelques pages d’un exemplaire du Coran devant la plus grande mosquée de Stockholm dans un « rassemblement » autorisé par la police suédoise ce mercredi au premier jour de la fête musulmane de l’Aïd al-Adha.

L’événement s’est déroulé dans le calme et sans heurts, sous la surveillance de la police. Une centaine de badauds et de journalistes se sont rassemblés pour observer l’autodafé organisé par Salwan Momika, un Irakien de 37 ans ayant fui son pays pour la Suède.

Vêtu d’un pantalon chino beige et d’une chemise claire, il a piétiné le Coran à plusieurs reprises avant d’y glisser des lamelles de bacon et d’en brûler quelques pages.

« C’est fou, c’est absolument insensé, ce n’est que de la haine qui se cache derrière les concepts de démocratie et de liberté », a réagi Noa Omran, artiste de 32 ans venue assister à la scène.

Exprimer « son opinion »

Plus tôt dans la journée, la police a annoncé autoriser « le rassemblement » car « les risques de sécurité » liés au fait de brûler le Coran « ne sont pas de nature à l’interdire ». Dans sa demande d’autorisation préalable, l’organisateur de l’autodafé, Salwan Momika a dit vouloir « exprimer (son) opinion à propos du Coran ».

« Je vais déchirer le Coran et le brûler », a-t-il écrit.

Salwan Momika avait fait une demande similaire en février, refusée par la police.

Adhésion à l’Otan

Le sujet est sensible en Suède: une manifestation en janvier au cours de laquelle un Coran avait été brûlé devant l’ambassade de Turquie à Stockholm avait suscité la colère de la Turquie qui bloque la candidature du pays scandinave à l’Otan.

Organisé par le militant d’extrême droite suédo-danois Rasmus Paludan, condamné pour injures racistes, l’évènement avait suscité la colère du monde musulman et débouché sur des manifestations et appels au boycott de produits suédois.

Selon un article du quotidien suédois Aftonbladet daté du 5 avril, Salwan Momika a assuré que son intention n’était pas de rendre difficile l’adhésion suédoise à l’Alliance atlantique.

« Je ne veux pas nuire à ce pays qui m’a accueilli et qui a préservé ma dignité », avait-il dit au journal, précisant que son intention était de voir le Coran interdit en Suède.

 

Le ministre turc des Affaires étrangères Hakan Fidan a immédiatement condamné l’incident sur Twitter : « Il est inacceptable de permettre ces actions anti-islamiques sous prétexte de liberté d’expression. »

Washington s’est joint aux critiques, tout en disant soutenir l’adhésion de la Suède à l’Otan « aussi vite que possible ». « Nous avons toujours dit que brûler des textes religieux est irrespectueux et offensant », a déclaré à la presse le porte-parole adjoint du département d’État, Vedant Patel.

Le Maroc a, de son côté, dénoncé un acte « offensant et irresponsable », et rappelé son ambassadeur en Suède, selon un communiqué officiel publié dans la nuit de mercredi à jeudi.

Deux rassemblements similaires les 6 et 9 février – dont l’un à l’initiative de Salwan Momika -, qui devaient voir des exemplaires du livre sacré de l’islam être brûlés, avaient été refusés par la police de Stockholm qui avait invoqué des risques de troubles à l’ordre public.

Risque d’attentats

Selon la police, la destruction du Coran par le feu est un phénomène en augmentation dans le pays, qui a fait de la Suède « une cible plus prioritaire pour les attentats ».

Les autodafés prévus en février n’avaient donc pas eu lieu. Les manifestants avaient dans la foulée fait appel de la décision, estimant que leur droit constitutionnel de manifester avait été bafoué. Un tribunal administratif leur avait donné raison début avril.

Mi-juin, la cour d’appel administrative a confirmé le jugement rendu en première instance, indiquant que les risques de sécurité avancés par la police « n’avaient pas de lien suffisamment clair » avec les rassemblements en question.

C’est sur cette base que la police suédoise a pris sa décision mercredi, à seulement quelques jours du sommet de Vilnius, les 11 et 12 juillet, où Stockholm espère des avancées pour son entrée dans l’Otan.

Ankara bloque la candidature de la Suède à l’OTAN, qui nécessite un feu vert unanime des membres de l’Alliance, en raison de ce qu’elle considère comme l’incapacité de Stockholm à sévir contre les groupes kurdes installés en Suède, qu’elle considère comme « terroristes ».

S.R. avec AFP