Plus de 87 millions d’électeurs étaient appelés samedi à choisir parmi 18 candidats l’homme qui aura la lourde tâche pendant quatre ans de redresser le pays le plus peuplé d’Afrique, plombé par une économie en berne, les violences récurrentes de groupes armés et de bandits, ainsi qu’un appauvrissement généralisé de la population.
Les résultats seront officiellement annoncés État par État à partir de 18h locales, selon le président de la Commission électorale nationale (Inec) Mahmood Yakubu lors d’un point presse à Abuja. La république du Nigeria compte 36 États et le territoire de la capitale fédérale.
Craintes de manipulation
Les données recueillies dans les quelque 176 000 bureaux de vote étaient censées remonter plus rapidement à Abuja grâce aux nouvelles technologies expérimentées pour la première fois dans une élection nationale. Si vote s’est globalement déroulé dans le calme, malgré quelques incidents sécuritaires et des couacs logistique, le transfert électronique et la publication des résultats a pris beaucoup de temps, attisant les craintes de manipulation des votes, alors que les scrutins précédents ont été entachés par des accusations de fraudes.
« Laissez le Nigeria décider », a écrit sur Twitter Burna Boy, star nigériane de la musique, interpellant la Commission électorale. Ce lauréat des Grammy Awards leur a lancé un avertissement : « N’essayez pas de faire de la magie avec les résultats ».
À 15h30 dimanche, dans un centre de collecte à Port Harcourt (Sud-Est), des agents électoraux continuaient d’envoyer les résultats, plusieurs heures après la fin des dépouillements. La veille au soir, dans plusieurs bureaux à travers le pays, des foules d’électeurs filmaient en direct les dépouillements, comptant à voix haute les bulletins avec les agents électoraux, dans une ambiance festive.
Possible second tour
Situation inédite depuis le retour à la démocratie en 1999, le Nigeria pourrait connaître une présidentielle à deux tours si l’outsider Peter Obi, qui a réussi à s’imposer comme un challenger sérieux face aux deux partis dominant traditionnellement la politique nigériane, transforme l’essai dans les urnes. L’ex-gouverneur d’Anambra (Sud-Est), un chrétien de 61 ans soutenu par le petit Parti travailliste (LP) et très populaire auprès de la jeunesse, affronte deux vétérans rompus à l’exercice du pouvoir.
Bola Tinubu, 70 ans, représente l’APC du président Muahammadu Buhari, qui se retire comme le veut la Constitution après deux mandats au bilan très critiqué. Considéré comme l’un des hommes les plus influents du pays, cet ancien gouverneur de Lagos, un Yorouba de confession musulmane, a prévenu : cette fois, « c’est mon tour ».
À 76 ans, l’ancien vice-président Atiku Abubakar, de l’opposition (PDP, au pouvoir de 1999 à 2015), briguera pour la sixième fois la présidence. Originaire du Nord et de confession musulmane, il espère rafler de nombreux votes dans cette partie du pays.
Mise en garde
Pour être élu dès le premier tour, le vainqueur doit obtenir, outre la majorité des suffrages exprimés, au moins 25% des voix dans les deux tiers des 36 États de la fédération auxquels s’ajoute le territoire de la capitale fédérale, Abuja. Sinon, un second tour devrait avoir lieu dans les 21 jours.
Le groupe d’observateurs Yiaga Africa (plus de 3 800 à travers le pays), s’est inquiété que les retards et cafouillages documentés jusque-là ne « sapent la confiance du public ».
Yiaga Africa a mis en garde la Commission : « si les résultats officiels sont manipulés à un moment quelconque du processus, nous serons en mesure de le révéler ».
Avec AFP